Le 27 septembre dernier, alors que près de 12 millions d’élèves avaient repris le chemin de l'école quelques jours auparavant, la Première ministre Elisabeth Borne, a lancé un appel à la "mobilisation générale" contre le harcèlement scolaire. Alors que 6 à 10% des écoliers en seraient victimes, comment l’Eglise peut-elle devenir un refuge pour les élèves harcelés, tout en formant une nouvelle génération pour lutter contre ce fléau ?
Lors de la présentation du plan interministériel de lutte contre le harcèlement scolaire, le 27 septembre dernier, la Première ministre Elisabeth Borne, a rappelé que cette problématique touche "en moyenne deux enfants par classe".
Le plan prévu par le gouvernement prévoit de renforcer les liens entre l’école, la police et la justice, avec une saisine "systématique" du procureur de la République en cas de signalement de harcèlement, mais également la mise en place de cours d’empathie, visant à sensibiliser à la bienveillance entre les enfants.
Le sujet du harcèlement est récemment revenu sur le devant de la scène après de nombreuses affaires toutes plus choquantes les unes que les autres. On peut notamment citer le suicide de Lindsay, 13 ans et de Nicolas, 15 ans, qui ont eu recours à ce geste tragique après avoir été harcelés dans le milieu scolaire.
Selon France Victimes, le harcèlement "se fonde sur le rejet de la différence et sur la stigmatisation de certaines caractéristiques". Une différence physique, un handicap, un trouble de la communication ou encore l’appartenance à un groupe social ou culturel en particulier peut être l'origine d’un harcèlement. Les conséquences pour les victimes sont multiples, elles vont du décrochage scolaire en passant par la dépression, les envies suicidaires et parfois le suicide, comme nous l'avons vu récemment dans l'actualité.
"L’Église doit pouvoir être un lieu de refuge"
InfoChrétienne a rencontré deux acteurs œuvrant pour la jeunesse chrétienne; Louis Rajiah, pasteur jeunesse de la megachurch Paris Centre Chrétien et Laëtitia Bardina, coordinatrice régionale en Ile de France des groupes bibliques lycéens (GBL). Nous avons abordé avec eux ce thème du harcèlement scolaire, ils nous ont partagé leur expérience du terrain.
Face au harcèlement, le pasteur Louis Rajiah, estime que "l’Eglise doit pouvoir être un lieu de refuge" pour ces jeunes harcelés. Selon lui, l’Eglise doit rester un lieu ou personne n’est rejeté mais au contraire inclut, "partisan d’un même corps".
"L’Église ne peut pas devenir le lieu de l’harcèlement, au contraire ça doit être un lieu où personne ne sera rejeté, moqué, mis de côté mais (au contraire) inclut, partisan d’un même corps. Les gens doivent savoir que l’Eglise est le lieu où (on peut) trouver du secours, du réconfort".
Il a rappelé qu’il arrive que les jeunes entre eux soient taquins, mais que tout responsable ou membre de l’équipe jeunesse d’une église doit veiller à ce que l’Eglise ne devienne pas "un lieu d'harcèlement".
Intervenir, former et apprendre
Les encadrants au GBL encouragent, pour leur part, les jeunes à "refuser que des gens de leur classe soient mis de côté". Ils les incitent à aller vers ceux vers qui personne ne va et à dénoncer tout acte de harcèlement.
Le pasteur Rajiah, souligne que l'Eglise, en tant qu’institution morale, se doit "d’intervenir, de former et d'apprendre à la future génération, comment faire face à ces injustices à l’extérieur de l'Église". Elle doit accompagner les jeunes à témoigner de leur foi auprès des victimes de harcèlement, ce qui pourrait leur "sauver" la vie, rappelle-t-il.
Les jeunes, eux-mêmes, s'investissent dans la lutte contre le harcèlement scolaire. C'est le cas notamment avec le projet "Identité en question", conçu pour et par les jeunes, réalisé par Inspir.tv, la Compagnie des Actes et Grain de Blé France. Il aborde "sans détour, les problématiques de leur quotidien avec la perspective des valeurs chrétiennes".
L’épisode 3 “Double victime” suit le quotidien d’un adolescent victime de harcèlement scolaire. Face à cette situation, un de ses amis chrétiens, lui partage sa foi en Dieu. Citant la Bible, il lui raconte ces histoires "où on voit Dieu aider des personnes qui vivaient une injustice". Un clip d'une vingtaine de minutes qui donne des clefs de compréhension et d'action pour les jeunes qui aimeraient aider un élève harcelé ou à ceux qui en serait eux-mêmes victimes.
L’Église ne peut remplacer les parents
Pour Laëtitia Bardina, des Groupes Bibliques Lycéens, les organisations religieuses ne doivent toutefois pas prendre la place des parents. Elle estime que lorsqu'un cas de harcèlement est découvert, c'est à eux d'intervenir. Le pasteur des jeunes de la megachurch Paris Centre Chrétien semble être du même avis et souligne que les parents doivent être "pro-actifs". Selon lui, ils doivent pouvoir prendre des décisions parfois radicales comme le changement d’établissement si l’enfant est en danger.
En effet, selon l’article 371-1 du Code civil, les parents détiennent l’autorité parentale qui les oblige à protéger leur enfant "dans sa sécurité, sa santé, sa moralité" mais également pour "assurer son éducation et permettre son développement". En ce sens, les parents contribuent avec l’école à l’éducation des enfants.
Dans un entretien accordé au média BRUT en novembre dernier, le ministre de l’Education Gabriel Attal rappelle ce rôle fondamental des parents dans l'éducation et la protection des enfants, en matière d’harcèlement. Dans cette vidéo, il a également annoncé la mise en place de modules de formation pour aider les familles à "détecter des situations de harcèlement" vécues par leur progéniture, dès janvier 2024.
INFO BRUT. @GabrielAttal annonce la mise en place d’une plate-forme pour début 2024 à destination des parents pour « détecter des situations de harcèlement ». pic.twitter.com/iKb4G1ewEM
— Brut FR (@brutofficiel) November 6, 2023
Mélanie Boukorras